Le pas suspendu du manchot :
Trois manchots sortent de l’eau sur une plage de sable noir avec en arrière plan, le Marion Dufresne, navire emblématique des Terres Australes et Antarctiques Françaises, qui surveille la baie.
C’est sur ce bateau, le Marion Dufresne, que François Lepage s’embarque en 2010 pour une première escapade du côté de la photo de nature et des terres du Grand Sud. Reporter-photographe, il était jusqu’alors plus tourné vers le documentaire et un travail sur l’humain. Aurait-il pris goût à la fraîcheur des terres Antarctiques ? Il a depuis repris avec entrain la vie de photographe-auteur, correspondant de Sipa Press pour la Bretagne.
Mais il prévoit pour la fin de cette année un nouveau départ pour l’Antarctique, pays de la glace et des pieds gelés. Ce pays où on doit porter les batteries contre soi comme des nouveau-nés pour que le matériel accepte de suivre l’œil du photographe !
Malgré un agenda bien rempli, il répond aujourd’hui à quelques questions pour TiragesPro.
TiragesPro :
Commençons par le début : pouvez-vous nous dire comment vous êtes devenu photographe professionnel ?
François Lepage :
Je n’ai pas fait d’études de photographie dans une école. Au moment de choisir mon orientation professionnelle, je manquais de confiance en moi pour envisager la photo en tant que métier. Mais mes études de lettres et mon travail comme enseignant de français langue étrangère m’ont permis de voyager, de photographier et surtout de prendre conscience de ce que je voulais vraiment faire. J’ai alors réalisé un reportage sur les filières industrielles en Afrique et en particulier au Kenya avec lequel j’ai ensuite démarché les agences, les magazines, … Mon travail a plu, même si ça ne s’est pas immédiatement concrétisé sous forme de contrat. Mais lorsque la place de correspondant pour l’ouest de la France s’est libérée chez Sipa Press, c’est moi qui l’ai eue.
La situation de la photo de presse n’est pas facile actuellement, mais j’ai beaucoup de projets qui me tiennent à cœur, des documentaires, des sujets humains avec à suivre, des expositions, des livres, des tirages d’art pour faire connaître mon travail. J’espère ainsi faire pleinement ce qui me plait le plus dans le travail de photographe : rencontrer et raconter les gens.
TiragesPro :
La photo de nature, c’est une nouvelle facette de votre travail ?
François Lepage :
Oui, lorsque j’ai embarqué sur le Marion-Dufresne, c’était à l’origine avec l’idée de faire un reportage sur le bateau, son fonctionnement, son équipage et son équipement. Une initiative de la journaliste Caroline Britz. Au départ, ça devait être quelque chose d’un peu technique pour un public averti. Et finalement, j’ai été pris par la beauté des paysages, des animaux, de la vie sauvage. À mon retour, les photos ont plu et Sipa Press, l’agence avec laquelle je travaille, m’a proposé de participer au projet « Cœur de nature en France », avec des reportages à réaliser dans les réserves naturelles.
Ça m’a permis de découvrir des endroits superbes et d’exposer mon travail sur les grilles du jardin du Luxembourg à Paris fin 2011. Puis en mars 2012, chez Marines Éditions, nous avons sorti un livre, avec les textes de Caroline Britz et mes photos : Marion Dufresne, ravitailleur du bout du monde.
Plus récemment, j’ai parcouru 270 km à pied dans les Cévennes : une France sauvage et oubliée… Magnifique, malgré les ampoules dues à mes chaussures neuves, les précédentes ayant laissé leurs derniers crampons dans le Jura cet hiver. Découvrir les merveilles des réserves naturelles, ça se mérite !
TiragesPro :
Ce voyage sur le Marion Dufresne semble vous avoir beaucoup apporté.
François Lepage :
Et ça m’a permis également de travailler avec mon frère Emmanuel, dessinateur de bandes dessinées. Il y a quelque temps, son livre Voyage aux îles de la Désolation et mon travail de photographe autour de ces mêmes îles ont été remarqués par l’IPEV, l’institut Paul Émile Victor qui nous propose une résidence en Antarctique avec au retour une expo, textes, photos et dessins. Les dessins d’Emmanuel seront scannés pour en faire des reproductions d’art.
Cette fois-ci, c’est vraiment la grande aventure puisque, faute de places supplémentaires, nous conduirons nous-mêmes des autochenilles dans le convoi de ravitaillement pour les bases australes, depuis Dumont-D’Urville jusqu’à Concordia : 1100 km. 10 à 12 jours de voyage par des températures pouvant descendre jusqu’à -50°. Et si les autochenilles s’enlisent, il va falloir pelleter pour les dégager. Ils m’ont même demandé de faire enlever la graisse de mes objectifs pour éviter qu’elle ne gèle. Un bon test pour mon matériel !
TiragesPro :
Et votre travail pour Sipa Press dans tout ça ?
François Lepage :
Même si la préparation de tels projets prend beaucoup de temps, je continue mon travail de reporter. Je suis l’actualité en Bretagne, les commandes d’entreprises. Parfois c’est moi qui propose les sujets, comme récemment un reportage sur de nombreux licenciements dans une usine de Rennes.
Une agence de presse a plusieurs rôles auprès du photographe. Elle m’appelle lorsqu’il y a des événements dans ma région, la Bretagne ou des commandes à traiter. Mais c’est aussi moi qui propose. Alors Sipa Press m’aide à trouver des partenaires, des personnes capables de financer mon travail. Actuellement, il est très rare de pouvoir placer un reportage entier dans un magazine, ils demandent plutôt des photos pour illustrer un sujet, des choses courtes et ponctuelles. L’âge d’or du photojournalisme est terminé, désormais les places sont chères.
Mais ce ne sont pas les projets qui manquent, plutôt le temps et les moyens financiers pour les réaliser.
TiragesPro :
Merci, François, pour votre disponibilité et bon courage pour la réalisation de tous vos projets. Pour nos lecteurs qui souhaitent aller plus loin, on rappelle qu’ils peuvent consulter votre site www.francoislepage.com. Ils pourront y trouver de nombreuses informations supplémentaires et même y commander des tirages d’art ou des cartes (sous l’onglet Galerie).
Mise-à-jour 04.04.2014 : François Lepage aux Éparses
Lors de notre rencontre, avec François Lepage en juillet 2012, il nous racontait la rotation sur le Marion Dufresne entre les Îles de la Désolation et leurs voisines australes, l’exposition « Cœur de Nature en France » sur les grilles du Sénat à Paris, le voyage en Antarctique vers les bases Concordia et Dumont d’Urville en préparation, et bien d’autres projets encore à concrétiser.
Un an et demi plus tard, les choses ont beaucoup évolué. Ces reportages dont il était question sont désormais intégrés à un vaste projet photographique sur les terres isolées et protégées de France : « Réserves ».
Dans ce projet, le regard du photographe se pose sur les liens forts et essentiels entre l’humain et la nature, faisant se rejoindre protecteur et protégé sur ces territoires aussi magnifiques qu’inaccessibles où tout est unique et chaque espèce endémique.
L’étape suivante de « Réserves », l’acte IV, concerne les Îles Éparses, des îlots, des bancs de sable, des cailloux minuscules situés aux alentours de Madagascar dans le canal du Mozambique. Pour entrevoir ce dernier recoin des TAAF, François Lepage retrouvera le Marion Dufresne et toutes les contraintes de ce genre de voyage : peu de temps, peu de liberté à terre et l’obligation de déclencher vite, bien et juste. Pour ça, on peut lui faire confiance.
Vous pouvez suivre te nouvelle étape, jour après jour sur son blog dédié : et même faire un peu partie du voyage en participant finacièrement à ce projet en vous rendant sur son KissKissBankBank.
Bibliographie :
- La Lune est blanche, 2014, Éditions Futuropolis — Voir sur Amazon »
- Les ombres claires, 2014, PerspectivesArt9 Éditions — Voir sur Amazon »
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